12.14.2013

sErVerBoDEotroSer

Le Verbe Être
Je connais le désespoir dans ses grandes lignes. Le désespoir n'a pas d'ailes, il ne se tient pas nécessairement à une table desservie sur une terrasse, le soir, au bord de la mer. C'est le désespoir et ce n'est pas le retour d'une quantité de petits faits comme des graines qui quittent à la nuit tombante un sillon pour un autre. Ce n'est pas la mousse sur une pierre ou le verre à boire. C'est un bateau criblé de neige, si vous voulez, comme les oiseaux qui tombent et leur sang n'a pas la moindre épaisseur. Je connais le désespoir dans ses grandes lignes. Une forme très petite, délimitée par un bijou de cheveux. C'est le désespoir. Un collier de perles pour lequel on ne saurait trouver de fermoir et dont l'existence ne tient pas même à un fil, voilà le désespoir. Le reste, nous n'en parlons pas. Nous n'avons pas fini de deséspérer, si nous commençons. Moi je désespère de l'abat-jour vers quatre heures, je désespère de l'éventail vers minuit, je désespère de la cigarette des condamnés. Je connais le désespoir dans ses grandes lignes. Le désespoir n'a pas de coeur, la main reste toujours au désespoir hors d'haleine, au désespoir dont les glaces ne nous disent jamais s'il est mort. Je vis de ce désespoir qui m'enchante. J'aime cette mouche bleue qui vole dans le ciel à l'heure où les étoiles chantonnent. Je connais dans ses grandes lignes le désespoir aux longs étonnements grêles, le désespoir de la fierté, le désespoir de la colère. Je me lève chaque jour comme tout le monde et je détends les bras sur un papier à fleurs, je ne me souviens de rien, et c'est toujours avec désespoir que je découvre les beaux arbres déracinés de la nuit. L'air de la chambre est beau comme des baguettes de tambour. Il fait un temps de temps. Je connais le désespoir dans ses grandes lignes. C'est comme le vent du rideau qui me tend la perche. A-t-on idée d'un désespoir pareil! Au feu! Ah! ils vont encore venir... Et les annonces de journal, et les réclames lumineuses le long du canal. Tas de sable, espèce de tas de sable! Dans ses grandes lignes le désespoir n'a pas d'importance. C'est une corvée d'arbres qui va encore faire une forêt, c'est une corvée d'étoiles qui va encore faire un jour de moins, c'est une corvée de jours de moins qui va encore faire ma vie. 


EL VERBO SER

Conozco la desesperación a grandes rasgos. La desesperación no tiene alas, no se halla necesariamente en una mesa servida en una terraza, en el atardecer, al borde del mar. Es la desesperación y no el regreso de una cantidad de hechos sin importancia como las semillas al caer la noche dejan un surco por otro. No es el musgo sobre una roca o el vaso para beber. Es un barco acribillado por la nieve si queréis, como los pájaros que caen y su sangre no tiene el más mínimo espesor. Conozco la desesperación a grandes rasgos. Una forma muy pequeña delimitada por joyas capilares. Es la desesperación. Un collar de perlas para el cual uno no sabría encontrar un broche y cuya existencia ni se sostiene en un hilo, tal la desesperación. Del resto no hablemos. No hemos terminado de desesperarnos si comenzáramos. Yo, me desespero por la pantalla de la lámpara a las cuatro, me desespero por el abanico a medianoche, me desespero por el cigarrillo de los condenados. Conozco la desesperación a grandes rasgos. La desesperación no tiene corazón, la mano queda siempre en la desesperación sin fuerza, en la desesperación cuyos hielos no nos dicen jamás si murió. Vivo de esta desesperación que me encanta. Amo esta mosca azul que vuela en el cielo a la hora que musitan las estrellas. A grandes rasgos conozco la desesperación, de vastos asombros menudos, la desesperación de la altivez, la desesperación de la cólera. Me levanto cada día como todo el mundo y descanso los brazos sobre un papel floreado, no me acuerdo de nada y siempre es con desesperación como descubro los hermosos árboles desarraigados de la noche. El aire de la habitación es bello como palillos de tambor. Hace un tiempo increíble. Conozco la desesperación a grandes rasgos. Es como el viento de la cortina que me asiste. ¡Se conoce semejante desesperación! ¡Fuego! Oh van a venir de nuevo... ¡Socorro! Helos aquí cayendo por la escalera... Y los anuncios del periódico y los avisos luminosos a lo largo del canal. ¡Montón de arena, vete, especie de montón de arena! En sus grandes rasgos la desesperación no tiene importancia. Es un hacinamiento de árboles que una vez más van a hacer una foresta, es un hacinamiento de estrellas que una vez más van a hacer un día de menos, es un hacinamiento de días que una vez más va a hacer mi vida.

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